J’espère que le précédent article « Le SaaS : le nouvel Eldorado des éditeurs » vous a éclairé sur les motivations des éditeurs.
Une fois ce point clarifié, reste une problématique épineuse : comment allons-nous gérer ces nouvelles règles commerciales afin de minimiser les impacts douloureux pour nos organisations ? Comment négocier au mieux ces nouveaux accords ?
Je n’aborderai pas ici tous les leviers de négociations mais quelques points cruciaux.
En préambule, il me parait fondamentale de distinguer un deal sur un nouveau logiciel en mode SaaS d’un deal de transformation d’un patrimoine logiciel en mode « on premise » vers le mode SaaS.
Nouveau logiciel :
Nous sommes dans le cas le plus favorable d’un point du vue « Client ». L’éditeur est dans une posture classique de vendeur, et la négociation « saine » est possible.
Le point d’attention particulier résidera dans la sécurisation de l’accord qui sera conclu sur le long terme. En effet, pour pénétrer un nouveau compte, l’éditeur est capable de proposer des offres très alléchantes.
Il est prêt à ne pas gagner d’argent sur un premier contrat : c’est l’appâtage. Celui-ci dure en moyenne 2 à 3 ans. Reste plus qu’à ferrer. Cela correspond au renouvellement du contrat. La solution que l’éditeur vous a vendu à un prix défiant toute concurrence est bien adoptée par votre organisation. Il se peut que vous n’ayez pas anticipé le renouvellement si votre organisation est satisfaite de la solution. A J-2 mois de la fin de contrat, l’éditeur gratte à votre boite mail. Si vous n’avez pas prévu contractuellement le cappage du renouvellement, vous vous exposez à un fort risque d’explosion des prix, et à une incapacité à trouver une solution alternative dans les délais impartis. Vous n’avez plus de levier de négociation, et un risque de coupure de service.
La transformation d’un patrimoine logiciel
Cette opération peut évidemment être à la demande du client, mais généralement elle est fortement poussée par l’éditeur.
Dans ce cas, il y a deux points majeurs d’attention.
1) Le premier est l’impact de la migration. Rarement sans effort, elle peut s’avérer douloureuse financièrement. Dans certains cas, la bascule dans le cloud est un projet, voire un programme selon la complexité de votre patrimoine.
Si la transformation est poussée par l’éditeur, il conviendra à ce dernier d’accompagner le client dans cette transformation, de mettre à disposition gratuitement les experts en appui de la DSI du client. Il serait malvenu que le client doive financer la mise en œuvre de la politique commerciale de l’éditeur.
2) Le second point majeur a abordé est le devenir des licences « on premise ».
Vous venez de vivre quelques décennies avec la recette éditeur suivante :
Pour réussir un bon SI : répartissez en couches épaisses des kilos euros de licences perpétuelles (n’hésitez pas à en mettre un peu plus), mettre une bonne couche d’euros de maintenance annuelle, fermer le couvercle, et travaillez tranquille.
Votre SI mijote tranquillement sous ces bonnes couches de licences, mais l’éditeur vous annonce qu’il veut cuisiner chez lui, et que désormais vous lui achèterez des plats tout préparés.
Que faites-vous de vos couches achetées au prix forts, dorlotées par des années et des années de kilos euros de maintenance appliqué scrupuleusement ? Elles sont encore bonnes, car perpétuelles. Mais plus d’aucune utilité. Poubelle ? Non !
Votre patrimoine de licences perpétuelle doit être intégré dans la négociation de la transformation. Il convient de dédommager le client d’un changement commercial décidé unilatéralement par l’éditeur.
L’éditeur refusera sûrement, allant même jusqu’à vous démontrer que perpétuelle ne peut pas exister. Il vous expliquera que votre patrimoine ne vaut rien. C’est du vécu.
Ne vous laissez pas faire. Le SaaS n’est ni plus ni moins que l’annulation et la négation de l’historique des relations commerciales entre un éditeur et ses clients.
Faites le bilan financier de votre patrimoine, acquisitions et maintenances. Mettez-le coute que coute dans la balance et imposez qu’il fasse partie de la dot.
Dans le prochain article, nous aborderons les aspects contractuels essentiels pour couvrir les risques clients.