Le SaaS : le nouvel Eldorado des éditeurs

Qu’est-ce que le SaaS ?

La compréhension la plus commune est la suivante :

Le SaaS (pour Software as a Service ou logiciel à la demande) est un modèle de distribution de logiciels dans lequel les applications sont hébergées par un fournisseur, le plus souvent éditeur, ou un prestataire de services, et mises à la disposition des clients via un réseau, généralement Internet.

Les promesses sont nombreuses :

–          Flexibilité,

–          Evolutivité,

–          Simplicité,

–          Gains financiers,

Cependant, derrière cette belle vitrine, se cache une réalité bien moins séduisante.

J’exerce des missions de Software Asset Manager et acheteur Logiciels depuis de nombreuses années, et cela me permet de vivre l’évolution du marché Logiciel de plein fouet.

Et le SaaS n’est ni plus ni moins que la dernière invention des éditeurs pour générer du cash.

Nous venons de vivre une très longue décennie d’audits de conformité de la part des éditeurs, et de bras de fer commerciaux qui ont valu quelques fractures à certains, dans les deux camps.

Un audit de conformité est l’assurance de cash à court terme mais de dégradation des relations commerciales, voire de blacklistage à long terme. Autant dire c’est tirer une balle dans la courbe de son forecast. De plus, la politique de l’audit peut fonctionner une fois, voire deux fois mais rarement plus. L’effet vertueux pour les clients a été une prise de conscience sur la nécessité de la maitrise de leur patrimoine logiciel, et de son optimisation. La répartition des forces entre éditeurs et clients tendant à s’équilibrer, nous, clients ou assimilés, nous trouvons devant un nouveau challenge, le SaaS.

Par cet article, ma volonté est de donner quelques pistes de réflexions à mes clients et mes confrères afin d’éviter de revivre ce que nous avons vécu avec les audits, et de manipuler le mode SaaS avec précaution et prudence.

Pourquoi le SaaS est inévitable….

Parce que les éditeurs ne nous laisseront pas le choix, car le SaaS est la meilleure arme commerciale pour obtenir des revenus récurrents, prédictibles et assurés.

Prenons un exemple :

Nous ne présentons plus le précurseur de ce nouveau modèle commercial dont les offres poste de travail E1, E3, E5 ont remplacé, par la force et la patiente, les licences on premise

 Je ne présenterai pas les avantages d’une telle bascule mais m’attarderai sur les inconvénients.

1/ impossibilité de figer le parc. Par la passé, certains clients faisaient le choix de figer les licences postes de travail dans une version X car le rythme de migration était supérieur à 3 ans, et ainsi la souscription de la maintenance devenait économiquement moins intéressante que le rachat de licences. 

2/ réduction drastique des leviers de négociation. Le client subit une dépendance accrue à l’éditeur, avec comme épée de Damoclès, la coupure de service. Quel client peut se permettre une interruption de service de tous ses logiciels bureautiques, messagerie incluse, ne serait-ce que 1 journée ? Alors que même sans maintenance, un logiciel « on premise » continue à rendre le service.

Pour illustrer mon propos, voici un rapide calcul sur la base des prix publics disponibles à date (octobre 2018), sur la base d’un O Pro Plus. L’hypothèse est basée sur une PME de 2000 postes de travail.

La stratégie du chef de la PME est un renouvellement de ses licences tous les 4 ans par rachat.

Grâce à l’offre SaaS, et grâce à tous les produits additionnels inclus dans cette offre dont ma PME n’a pas besoin, sur 8 ans, elle perd 1.076 millions juste sur son équipement bureautique.

 

 Impressionnant, n’est-ce pas ?

Ceci dit, un jour ma PME n’aura pas d’autre choix que basculer sur l’offre SaaS. A ce moment, l’éditeur lui expliquera que les licences « on premise », donc perpétuelle, ne le sont pas/plus et qu’il peut « les jeter ».

Une fois qu’il aura enfin souscrit ses abonnements E3, le voilà « marié » à l’éditeur pour une durée indéterminée, faute de solution viable alternative. Il subira, au gré de la volonté de l’éditeur, re-packaging, re branding et autre de l’offre de services par ajout ou suppression de fonctionnalités, et bien sûr hausse de tarif.

Ceci dit, je n’ai rien contre les logiciels bureautiques, je vais donc bifurquer sur d’autres secteurs.

Grâce à l’offre SaaS, nous promet-on, nous voici à l’aire de packaging tarifaire ultime : logiciel, infrastructure, stockage, et services.

Oui mais non. Chez certains éditeurs, l’infrastructure est en supplément. Certains vont même jusqu‘à demander un engagement de 4 ans, ce qui revient à vous louer les serveurs sur lesquels tournent des logiciels qui ne vous appartiennent pas, serveurs qui à la fin de la période ne vous appartiennent pas non plus ! Un bon exemple de flexibilité et de gains économiques. 

Et que dire des coûts de projet… Basculer votre parc on premise vers le cloud ne sera pas gratuit. Certains éditeurs vous propose leur savoir-faire moyennant quelques milliers d’euros, sans engagement de résultats.

Sur de nouveaux produits, parfois les éditeurs vous facturent l’installation du logiciel.

Et que dire des métriques de facturations ? A l’utilisateur et au mois : à l’affichage le prix est plus attractif… Au serveur cappé en nombre de cores, au nœud avec un minimum de noeuds…

Mais la bonne nouvelle est la fin des audits, n’est-ce pas ?

Pas si sûr. En effet, nombre d’éditeurs ne met pas de système de verrouillage dans l’extension de l’utilisation du service. Si le client n’est pas vigilant, alors il peut se trouver dans une situation de surconsommation, donc de non-conformité, détectée immédiatement par l’éditeur.

Qu’on se le dise : le SaaS n’a rien de révolutionnaire. Ce n’est qu’un mode de commercialisation adapté aux enjeux de croissance des éditeurs.

Les clients ont le devoir de manipuler ces nouveaux modèles avec précautions, et à bien négocier les contrats ad-hoc sous peine de perdre beaucoup d’argent.

J’aborderai les bonnes pratiques contractuelles dans un prochain billet.

En attendant, n’oubliez pas : tout est négociable.